vendredi 8 avril 2016

2008 Cuba

Lundi 21 avril 2008

Viviane et moi avons passé la nuit chez Patrice et Christiane à Ris-Orangis.
Le matin, nous prenons le RER jusqu’à l’aéroport de Roissy où nous arrivons à 9h.
12h10 -14h10 : vol Paris-Madrid.
A 17h25, départ de Madrid pour Cuba, par un vol d’Iberia.
Arrivée à CUBA à 21h30 (heure locale) après 10h de vol et 6h de décalage horaire.

Après la découverte de l’île en 1492 par Christophe Colomb, Cuba sera une colonie espagnole depuis 1511 jusqu’en 1898 puis, après le traité de Paris, un territoire sous administration militaire américaine. La République de Cuba devient officiellement indépendante le 20 mai 1902. Dans les faits, les présidents corrompus se succèdent au pouvoir sous la mainmise des Etats-Unis, et Cuba devient le « bordel de l’Amérique ».
Le 1er janvier 1959, la Révolution cubaine triomphe. Fidel Castro renverse le dictateur Fulgencio Batista. Il dirigera Cuba jusqu'au 31 juillet 2006. Son frère Raúl Castro Ruz, après avoir assuré l'intérim du pouvoir, est élu le 24 février 2008 président du Conseil d'État et du Conseil des ministres par l'Assemblée nationale.

Après les formalités policières et douanières (passeport et carte de tourisme) à l’aéroport international José Martí, nous nous dirigeons vers un guichet de change.
Il y a deux monnaies en circulation à Cuba. La monnaie nationale est le peso cubain (CUP). Pour les étrangers, c’est le peso convertible (CUC) qui vaut 24 fois plus ! Le change se fait donc contre des pesos convertibles.
Nous nous rendons en taxi à LA HABANA (La Havane).
Nous arrivons de nuit à Vedado, un quartier à l’ouest de la ville. Nous rejoignons une « casa particulare » (chambre chez l’habitant) louée à l’avance depuis la France.
La « casa particulare » est le moyen le plus facile de se loger à Cuba. C’est bien plus sympathique et beaucoup moins onéreux qu’un hôtel.
Depuis 1997, une loi autorise les particuliers à héberger des étrangers chez eux moyennant finances. C’est une brèche dans le système étatique, mais le gouvernement est le premier à en profiter : les propriétaires doivent acquitter une forte taxe.
Nous y arrivons à 22h30. Le logeur qui nous reçoit ne parle qu’espagnol. La chambre, située en étage, ne possède pas de vitre, juste des volets à lamelles. Nous branchons une climatisation vieillotte mais nécessaire.

Mardi 22 avril 2008

Au matin, nous prenons le petit déjeuner dans la salle à manger de l’appartement. Café avec omelette ou œufs brouillés, petites saucisses et fruits de toutes sortes : mangue, pastèque, goyave, papaye, mamey… Un vrai régal !
Par la suite, nous allons récupérer en taxi dans une agence une voiture de location louée à l’avance depuis la France. Tracasseries pour récupérer la voiture, car nous ne l’avons pas cherchée la veille comme prévu. Evidemment, en pleine nuit !
Tout s’arrange, et à partir de 11h30, nous visitons La Havane.
Fondée en 1519, la ville a accumulé au cours des siècles un patrimoine architectural considérable. C’est une ville fascinante. La politique de restauration entreprise depuis 1982 sur fonds de l’Unesco a permis de rénover et redorer le cœur historique de la capitale.
Nous pénétrons au centre-ville par le front de mer, El Malecón, l’épine dorsale de La Havane qui s’étire sur huit kilomètres, incontournable digue qui protège la ville des assauts de l’océan. Beauté des anciennes maisons et palais coloniaux usés par le temps… Symbole de la ville, image culte de la capitale cubaine, on vient y rêver de l’Amérique, face au détroit de Floride…
Nous garons la voiture le long du port, sous la surveillance d’un gardien de parking officiel, en acquittant une taxe.
Parcours à pied dans Habana Vieja, le centre historique. Témoignage unique de l’architecture  coloniale espagnole, il a conservé son caractère populaire. C’est le plus grand ensemble architectural colonial d’Amérique latine, entièrement classé au patrimoine de l’humanité.

Nous commençons notre visite autour de la cathédrale, sur la « plaza de la catedral », ensemble harmonieux et homogène de l’époque coloniale, une des plus belles places de la ville. Un cortège folklorique de femmes aux vêtements très colorés parcourt les rues sur des échasses au son des tambours et des percussions…


La plaza de Armas : construite dès le XVIe siècle, c’est ici que tout a commencé. Plusieurs fois modifiée, elle a aujourd’hui le visage qu’elle avait en 1841, entourée de prestigieux édifices. De nombreux bouquinistes y sont installés, ainsi qu’un marché pour touristes bien moins intéressant.
La plaza Vieja, écrasée de soleil : elle s’imposa rapidement comme le cœur de la ville et  fut un endroit prestigieux aux XVIIe et XVIIIe siècles.


Presque totalement restaurée, elle aligne bon nombre de beaux palais. Il ne reste plus qu’une ou deux demeures délabrées. Festival de portiques, loggias, façades ornées de balcons en bois, porches montés sur colonnes…


La calle Obispo : une des rues les plus pittoresques de la vieille ville. Rue commerçante avec librairies, galeries de peinture. On passe devant El Floridita, un bar mythique où descendait Ernest Hemingway dans les années 1930 et qui attira dans son sillage les stars hollywoodiennes.


La ville est un régal d’architecture coloniale.


Maisons craquelées, palais lézardés, façades fatiguées, demeures ouvertes à tout vent… 




C’est le côté pathétique de cette ville décadente dans tous les sens du terme.

Entre-temps, à 13h, nous mangeons à « la Paëlla », un restaurant d’état. C’est un restaurant officiel où l’on paie en pesos convertibles, fréquenté surtout par les étrangers. Décor rustique et plaisant. D’après le Guide du Routard, les paëllas font douter que Cuba fut une colonie espagnole ! Ce sera donc du poulet aux crevettes…

Le spectacle dans la rue est permanent : les vélos-taxis, sortes de cyclo-pousses à la cubaine ; les cocos-taxis, scooters tricycles en forme de noix de coco…jaune !


Et puis… les belles américaines ! Ce sont les guimbardes américaines des années 1950. Il y en aurait même plus qu’aux Etats-Unis. Dans ces années-fric, on en importa des dizaines de milliers. Le coup d’arrêt intervint avec la révolution castriste. Les Etats-Unis imposèrent un sévère embargo commercial. Plus de possibilité d’acheter des voitures. Les Cubains se mirent à les faire durer au lieu de les mettre à la casse. Spectacle unique dans les rues. 


Beaucoup de voitures sont d’authentiques pièces de collection entretenues et bichonnées pour les faire durer le plus longtemps possible.


Il est actuellement interdit de les exporter : elles sont considérées comme patrimoine national !
En parcourant les rues, on passe devant une école dont la porte est ouverte sur le hall. La maîtresse fait danser des enfants devant un portrait du Che Guevara.


Plus loin, nous rencontrons une vieille afro-cubaine qui fume un cigare, assise sur sa chaise. Tout de blanc vêtue, fleurs rouges accrochées à la coiffe, le cigare à la bouche, elle correspond tout à fait au cliché des dépliants touristiques.


Lorsqu’elle nous aperçoit, le Guide du Routard à la main, elle en sort un exemplaire de dessous sa chaise et l’exhibe sous nos yeux en affirmant que c’est bien elle qui est en photo sur la page de couverture. Bien sûr ! On fait semblant d’y croire et tout le monde est content, le temps d’une photo et d’un petit pourboire…


L’esclavage n’a été aboli à Cuba qu’en 1886.  La population est majoritairement métisse, à 51%. Elle englobe également 37% de blancs et 11% de noirs.  Après l’extermination des Indiens d’origine, l’immigration espagnole et l’importation d’esclaves africains ont contribué à créer cette palette de population. En dehors de Cuba, seul le Brésil présente une telle proportion de métissages.
Revenant vers la voiture, nous faisons une pause à la terrasse d’un café sur la plaza de Armas, à l’ombre bienfaisante de parasols. Entre les pieds de chaise, se promène un coq qui vient quémander quelque pitance !

A 16h30, nous quittons La Havane en voiture. Franchissant le tunnel qui passe sous la baie de La Havane, nous avons l’intention de rejoindre la côte et les plages du nord-est. Et là, tout se complique. Il n’y a pratiquement aucun panneau d’indication. Nous ne trouverons jamais la route que nous voulions emprunter. Un large périphérique contourne la capitale d’est en ouest. Au bout d’une heure, nous apercevons des immeubles. Tiens, où sommes-nous donc ? A La Havane, pardi, mais du côté ouest !
Cette sortie nous permet déjà de nous faire une idée des routes et de la circulation à Cuba. D’immenses panneaux de propagande marxiste et patriotique s’égrènent tout au long des axes routiers. 


Nous n’avions pas revu cela depuis nos premiers voyages dans les pays de l’Est : Tchécoslovaquie (1980) et  Hongrie (1982).

Nous sommes de retour pour 19h dans le quartier Vedado. Nous garons la voiture dans un garage bien verrouillé de notre « casa ».
Le Vedado est un quartier urbain conçu en damier qui s’inspire directement du modèle nord-américain. C’est le centre de la ville moderne, quartier résidentiel où vit la majorité des classes moyennes. Il est traversé par la célèbre avenue la Rampa, la plus animée de la ville.
Quant à notre chambre, elle est située sur le Paseo, une autre grande avenue  perpendiculaire.
Vers 20h, nous allons prendre un cocktail à la Casa de la Amistad (conseillée aussi bien par le Routard que par le Petit Futé, pour sa convivialité), dans le patio d’une belle demeure coloniale. Nous y prenons un plat : du poulet frit avec du riz. C’est la base de la cuisine dite « créole ».
La nuit tombe. Douceur de la nuit tropicale sous la tonnelle…

Mercredi 23 avril 2008

Ce matin, nous arpentons à pied le Paseo jusqu’à la « plaza de la Revolución ».
La place de la Révolution est une immense esplanade qui peut contenir jusqu’à un million de personnes ! Depuis 1959, cette vaste esplanade a connu toutes les grandes heures de l’histoire cubaine. C’est ici que pendant des années, Fidel Castro a prononcé ses très longs discours enflammés qui pouvaient durer de trois à six heures, devant d’immenses foules !
En face, sur la façade du ministère de l’Intérieur, un portrait géant du Che Guevara.


L’idole la plus vénérée à Cuba, Ernesto Guevara est argentin. Il rencontra Fidel Castro à Mexico en 1955 et devint son compagnon de lutte dans la révolution cubaine. Après la libération de Cuba, il vivra six années de pouvoir puis il reprendra son itinérance révolutionnaire. Capturé en Bolivie en 1967, il fut exécuté sur ordre de la CIA. De cet assassinat va naître le plus beau mythe contemporain d’Amérique latine, entretenu par Fidel Castro. Le « Che » repose actuellement dans un mausolée à Santa Clara, au centre de Cuba.
Son portrait, à l’instar de Fidel Castro et de José Martí, se retrouve partout à Cuba.

Le monument à José Martí est une étrange pyramide de béton construite à l’époque de Batista. Deux tarifs différents sont appliqués : l’un pour les Cubains, l’autre pour les étrangers.
Le musée présente une rétrospective de la vie et de l’œuvre politique et intellectuelle du héros cubain.


Figure charismatique, héros de la guerre d’indépendance contre l’Espagne, José Marti est tué à la bataille de Dos Rios le 19 mai 1895. L'Espagne vaincue quittera Cuba en 1898 pour être remplacée par les Etats-Unis. Marti avait prévu que le Yankee remplacerait l'Espagnol et  dénonça son impérialisme naissant.
Après la visite du musée, nous montons par un ascenseur dans la pyramide. Du sommet de l’obélisque, la vue sur La Havane est superbe. De petits vautours, omniprésents à Cuba, les urubus à tête rouge (Cathartes aura), hantent les lieux et même nichent au sommet de la tour, tels les choucas de nos églises européennes.

Nous quittons La Havane par les grandes avenues du Vedado puis de Miramar, le quartier le plus chic de la capitale, héritage de la république néo-coloniale de 1902 à 1958. Ambassades et résidences de luxe sont regroupées dans le secteur. Conception urbanistique nord-américaine en damier. Comme à New-York, le décompte des secondes restantes avant le passage au vert s’affiche aux feux rouges.
Equipés de bouteilles d’eau minérale, nous empruntons vers l’ouest de l’île l’« auto-pista este-oeste », grande route à deux chaussées séparées, appelée autoroute.
Des dizaines de personnes sont  au bord de la route et font de l’auto-stop.
Les transports intérieurs sont un problème à Cuba. Les voitures circulent peu, les trains sont rares et les bus sont pris d’assaut. Les bennes des camions sont remplies à ras bord. Résultat : l’auto-stop est le moyen de transport le plus utilisé à Cuba.
A la sortie des villes, la concurrence est dure. D’ailleurs des agents de l’Etat, habillés de jaune,  repèrent les véhicules administratifs qui passent et les font s’arrêter pour charger les gens qui attendent.
Comme il n’y a aucun panneau d’indication, la seule chose à faire est de s’arrêter et de demander son chemin. L’idéal est même de charger un auto-stoppeur qui va dans la même direction et qui vous indique le chemin !
Un autre souci : beaucoup de véhicules lents et poussifs, et des charrettes à cheval, même sur l'autopista !
La propagande du Parti communiste cubain est permanente, tout au long de la route. 


En fait, c’est vraiment un marxisme à la sauce tropicale ! La population est plus « fidéliste » que communiste. « Fidel sera toujours Fidel ! »
Après 180 km d’autopista, nous arrivons à Pinar del Rio, dans l’ouest de l’île. Centre économique et capitale de la province du même nom, c’est la terre du tabac, qui en est la principale ressource. Architecture néo-classique qui dégage un certain charme avec ses maisons aux portiques à colonnades. 


A l’entrée de la ville, nous sommes importunés par un jeune en vélo. D’abord il nous fait signe d’arrêter, puis il nous suit pendant tout notre parcours de la ville. Impossible de le lâcher ! Infatigable, il tient absolument à nous mener où il veut, c'est-à-dire nous rabattre sur un paladar
Nous nous garons au centre-ville. On va boire une bière à un bar en plein air dans une cour intérieure. Le jeune en vélo nous y retrouve. On discute de la France où il a bien entendu de la famille, etc. Finalement, on lui fait comprendre que l’on va manger juste à côté, et que l’on n’a pas besoin de ses services. Indiqué par nos deux guides, la « Casona » est  l’un des restos les plus économiques de la ville, où se côtoient Cubains et touristes. Tables et bancs en bois, service lent, cuisine convenable sans prétention…
L’après-midi, nous nous dirigeons vers le parc national de Viñales. La route d’abord sinueuse débouche sur une verdoyante vallée, avec des paysages de flamboyants, d’orangers, de bougainvillées. Et bien sûr des plants de tabac et de canne à sucre, où sont à l’œuvre charrues à bœufs et  attelages à cheval ; aussi des « bohios », petites maisons paysannes traditionnelles en bois peint, au toit de palmes, avec une petite véranda devant. 

















Et de ce paysage paisible, au milieu des champs à la terre rouge, surgissent d’impressionnants monticules recouverts de verdure, les mogotes.


Ces étranges formations géologiques sont des reliefs karstiques hérités de la période jurassique.
Lors d’un arrêt en bord de route, un paysan me propose des cigares. A une intersection, des auto-stoppeurs nous font signe que nous n’allons pas dans la bonne direction. Classique ! C’est une tactique pour nous faire arrêter et profiter de la voiture.
On atteint Viñales, une charmante bourgade aux rues ombragées et colorées. Nous nous garons près d’une agréable placette dominée par une belle église coloniale et ombragée par un arbre tropical aux grands bouquets de fleurs blanches. 


Petite promenade dans la rue principale à l’architecture harmonieuse et au charme champêtre. Les maisons basses sont peintes en rose ou bleu et possèdent toutes un perron soutenu par des colonnades.


Nous buvons un pot à l’ombre des arbres tropicaux. Une très vieille voiture de couleur jaune et bichonnée, garée sous les arbres, ferait le bonheur d’un collectionneur européen !


On quitte Viñales par une route du nord qui passe au pied d’imposants mogotes et se faufile dans des vallées à la végétation tropicale abondante et variée. Sur le parcours, on fait une halte et une petite promenade dans un parc sous les palmiers, les cocotiers, les eucalyptus, les fougères arborescentes, les yagruma et autres essences tropicales. 



On débouche sur la côte nord dans le village de pêcheurs de Puerto Esperanza. A partir de là, on essaye de rentrer vers La Havane par une petite route côtière : chaussée défoncée, nids-de-poules et cul-de-sac dans un village. Demi-tour pour rejoindre une route plus carrossable qui se dirige vers Bahía Honda entre la sierra del Rosario au sud et la côte nord de l’île sur le golfe du Mexique. La route longe une végétation de palmiers et de bananiers, avec des zébus dans les champs.
















Nous chargeons une dame en auto-stop. Chacun y trouve son compte. Elle nous sera bien utile pour nous indiquer le chemin, d’autant plus que le jour baisse.
Nous arrivons de nuit à La Havane, vers 21h30.
On trouve à manger dans un kiosque encore ouvert sur la Rampa : un genre de croque-monsieur avec une canette de bière…

Jeudi 24 avril 2008

Ce matin, nous retournons dans Habana Vieja pour visiter le Capitole.
Nous nous garons sur un grand parking juste à côté de cocos-taxis.


Sur la place du Capitole, une splendide Buick nord-américaine, qui fait office de taxi, attend le client.


Le Capitole a été inauguré en 1929 par le dictateur Machado, désireux de copier celui de Washington. Il fut le siège de la Chambre des représentants et du Sénat jusqu’à la révolution castriste. C’est la reproduction du Capitole de Washington. Une immense salle des pas perdus, une colossale statue, un vaste escalier de granit et quatorze salles dépouillées mais très vastes.
Au hasard d’un couloir, sous le manteau, on nous propose en catimini des billets à l’effigie du Che, comme s’ils étaient des pièces de collection… Plus loin, une gardienne s’improvise guide alors que nous avons payé un billet sans guide ! Elle nous précède dans les pièces, donne quelques explications puis bien sûr nous demande une gratification lorsque nous nous éloignons. Refus poli, mais nécessaire. Sinon, c’est l’escalade et la surenchère vis-à-vis des touristes.
A la sortie, des calèches attendent les clients sur la place. Nous empruntons une de ces calèches avec laquelle nous effectuons le tour de la vieille ville.
Au retour, nous visitons le musée du rhum Havana Club. Dans un beau palais du XVIIIe siècle, la fondation Havana Club (la célèbre marque cubaine) offre une rencontre avec l’histoire du rhum de Cuba depuis ses origines. Musée très vivant avec comme clou de la visite une superbe maquette d’une sucrerie des années 1930 et son petit train apportant la canne. La visite guidée en français est suivie d’une dégustation. Nous achetons quelques bouteilles.

Lorsque nous en sortons, nous allons prendre un cocktail au bar Dos Hermanos, face au port.
Ancien bar à prostituées des marins américains avant la Révolution, le bar n’a pas changé, avec son long comptoir en bois ; seule la clientèle a évolué.
Le bar propose une large sélection de cocktails cubains. On savoure un « mojito » au son d’un orchestre.
Nous mangeons également sur place.
L’après-midi, dans une « cadeca », nous changeons quelques CUC contre des pesos cubains. Dans les lieux non touristiques et dans le reste de l’île, certains magasins et restos cubains acceptent uniquement la monnaie nationale. Il en va de même dans la rue. Nous achetons une glace à une échoppe. On nous rend la monnaie avec notamment un billet de trois pesos, à l’effigie du Che, celui-là même que l’on essayait de nous refiler contre CUC sonnants et trébuchants au Capitole. Il s’agit tout simplement d’un billet toujours en circulation et qui ne vaut strictement rien !
Nous allons maintenant visiter le musée de la Révolution, abrité dans l’ancien palais présidentiel. Il présente sur trois niveaux une vision complète et chronologique de l’histoire des luttes des Cubains pour leur indépendance. C’est très dense, très pédagogique, mais on en sort étourdi par la propagande.
A l’extérieur du musée, on découvre le mémorial Granma
Le 25 novembre 1956,  Fidel Castro et ses 81 compagnons, les « barbudos », (dont Che Guevara, Raúl Castro, Camilo Cienfuegos) embarquèrent au Mexique à bord du yacht Granma et débarquèrent le 2 décembre sur une plage de l’Oriente. Les survivants parvinrent à rejoindre la sierra Maestra d’où partira deux ans plus tard l’offensive finale.
Le célèbre yacht est exposé derrière une vitre de verre. Autour du yacht, on peut apercevoir les armes et les véhicules qui ont été utilisés lors de la lutte révolutionnaire.
Dans la rue est garé un vieux School bus américain, jaune, magnifique, rutilant, émouvant…


Nous parcourons le marché à babioles de la plaza de Armas, dédié aux touristes. Mais Viviane aime ça ! Pour compenser, nous allons boire un cocktail dans un bar de la place.
Le soir, nous mangeons au Vedado dans un « paladar », El Gringo Viejo. C’est un petit restaurant privé, invisible depuis la rue. On y descend par une rampe de garage ; et en bas il faut sonner. A l’intérieur, petite salle couverte de boiseries. C’est un véritable petit restaurant familial, fréquenté par les artistes de la capitale.
Les « paladares » sont des restaurants privés, fortement fiscalisés, autorisés depuis quelques années. Cuba n’est pas vraiment une destination gastronomique. Heureusement, c’est le pays de la langouste, mais les Cubains n’ont pas le droit d’en détenir. Ces produits sont destinés à l’exportation et aux restaurants d’Etat. Les plus débrouillards s’en procurent au marché noir.
Nous mangerons donc de la langouste, «  a la plancha » !
                                                                
Vendredi 25 avril 2008

Aujourd’hui, nous quittons notre chambre à La Havane et prenons la route de l’est vers Trinidad.
C’est la galère pour sortir de la ville. Les panneaux d’indication nous entraînent d’abord dans une certaine direction. Puis plus rien. On tourne en rond, on se retrouve dans une friche en cul-de-sac jusqu’à ce qu’une voiture nous aborde. Les deux occupants nous proposent de nous guider vers la sortie de la ville. On les suit, dans des dédales de rues de banlieues. On se rend vite compte qu’ils nous mènent en bateau pour faire durer la course. Lorsqu’ils nous laissent à la sortie est de la ville, ils demandent un pourboire conséquent en CUC, et ils sont gourmands…
On s’est fait arnaquer en beauté ! Enfin, l’essentiel est d’être dans la bonne direction.   

L’ « autopista nacional » traverse l’île en direction de Santa Clara.
Des vendeurs n'hésitent pas à s'approcher fort près des voitures pour montrer ce qu'ils ont à vendre ou encore étalent quelques fruits, parfois sur la partie de la route où l’on est engagé. On peut faire demi-tour sans problème là où on veut, c'est parfois très surprenant ! A cela s’ajoute une conduite au milieu ou à gauche de la chaussée, qui ne laisse que la droite pour doubler, sans compter les arrêts impromptus des véhicules pour charger des gens.
Dans les champs, les paysans sont au travail, souvent avec l’aide de zébus attelés par deux à la charrue et reliés entre eux par un joug reposant sur la nuque.


La propagande est omniprésente. On trouve régulièrement des rappels du coût du blocus américain sur l'économie cubaine. Ici, un panneau explique que le coût de 8 heures de blocus, en pertes pour l'économie de l'île, équivaut au budget de la réparation de 40 hôpitaux…
Après la chute de l’URSS et des pays du bloc de l’Est, Cuba est frappée de plein fouet par la perte de ses principaux partenaires. Economiquement exsangue, le pays entre dans une très grave récession économique. C’est le régime de la « période spéciale », un programme d’austérité. Le problème s’aggrave du fait du maintien de l’embargo américain. Alors, le système D et le troc font fortune, le marché noir se généralise. Le peuple vit dans une grande misère. Il faut cependant souligner que beaucoup de services à la population sont peu chers, voire totalement gratuits, comme la médecine et l’éducation, qui sont de grande qualité.
Depuis 1995, une certaine remontée économique se dessine grâce aux devises du tourisme international. De nouveaux grands frères sont apparus, après le passage à gauche de nombreux pays d’Amérique latine, dont le Vénézuéla. Hugo Chavez fleurit sur les panneaux de propagande, aux côtés de Fidel Castro.
Au bout de 150 km, nous délaissons l’autoroute et bifurquons vers la péninsule de Zapata. C’est une vaste zone marécageuse qui abrite le parc national de Montemar. Les marécages forment la plus belle réserve naturelle du pays, paradis des oiseaux, des poissons et des crocodiles.
Nous atteignons Playa Larga, située sur la célèbre baie des Cochons. C’est une plage populaire agréable fréquentée par les Cubains et les touristes, pour la beauté des eaux transparentes de la mer des Caraïbes et les plages de sable blanc. C’est également un site de plongée sous-marine (présence de corail noir). 
















Peu avant d’arriver, nous apercevons quelques crabes qui traversent la route. Et plus nous avançons, plus il y en a. A Playa Larga, ils sont littéralement partout. 
















C'est très impressionnant. Les crabes terrestres cubains (Gecarcinus ruricola) sortent par milliers de la mangrove pour aller pondre dans la mer. Après quelques semaines, les bébés crabes regagneront la terre. En voiture, on ne peut pas les éviter tous. Ils dressent pathétiquement leurs pinces en présence du danger. Les taxis qu'on croise ou qui nous doublent prennent beaucoup moins de pincettes (!) que nous. Et ça pue ! Et les vautours se régalent des crabes écrabouillés sur la route.
On fait une halte sur le site, un petit tour au bord de la plage. Je réponds un peu brutalement à un Cubain qui vient nous importuner en quémandant sur le parking...
Alors nous poursuivons en bord de mer jusqu’à Playa Girón, à l’entrée de la baie des Cochons.
C’est sur cette côte que le 17 avril 1961 débarquèrent 1400 mercenaires cubains anti-castristes entraînés et financés par les Etats-Unis, après le feu vert donné par le président Kennedy. Ce fut un échec. L’évènement aura valeur de symbole dans l’ensemble de l’Amérique latine et du tiers-monde. Fidel Castro en profitera pour proclamer pour la première fois le caractère « socialiste » de la Révolution cubaine, alors qu’elle était avant tout nationaliste et anti-impérialiste.
« Playa Girón, première défaite de l’impérialisme » proclament les panneaux de propagande patriotique. C’est un lieu commémoratif et un symbole national.  Il n’y a pas grand-chose à voir. 
Nous reprenons la route à l’intérieur des terres en direction de Cienfuegos, incertaine, pleine de nids-de-poule. Dans un village, on fait un arrêt dans un bistro. Les tables sont en formica et les chaises sont branlantes. Pas l’habitude des touristes. Ici, on ne paie qu’en monnaie nationale.
On rencontre de beaux arbres verdoyants pleins de fruits. Il y a à Cuba plus de fruits que n’importe où ailleurs dans les îles des Caraïbes : oranges, citrons, papayes, mandarines, pamplemousses, mangues, goyaves…


Les « checkpoints » de police sont nombreux sur les routes cubaines. A chaque passage devant un point de contrôle, il faut rouler très lentement. C’est parce que j’oublie cette règle que je me fais arrêter. Le policier me fait comprendre que je roule trop vite, mais me laisse repartir sans problème. Le tourisme, une priorité nationale... Que se serait-il passé si j’avais été Cubain ?
Aux alentours de Cienfuegos, à la faveur d’une intersection incertaine, nous chargeons deux auto-stoppeurs. L’un nous demande où l’on va loger et manger à Trinidad. Il nous présente une photo de sa « femme » et de son « restaurant ». Nous ne sommes pas dupes, mais comme nous n’avons de toute façon pas de programme précis, pourquoi pas ? On prend rendez-vous pour 19h.
Il est 16h30 lorsque nous atteignons Trinidad, ville nichée entre les collines avancées de la sierra de l’Escambray et la mer des Caraïbes.

D’abord, trouver la « casa particulare » que nous avons réservée. Pas de chance, elle est  occupée. En fait, le logeur fait du « surbooking », pratique assez fréquente qui consiste à accepter de louer une chambre alors qu’elle est déjà prise. Mais ça n’est guère un problème. Les logeurs sont de mèche entre eux. On nous propose de loger un peu plus loin chez un collègue, rue Frank Pais. Et ma foi, nous ne perdrons pas au change : une petite chambre individuelle qui donne sur un charmant patio fleuri, à l’arrière de l’habitation principale.
Nous nous installons dans la chambre. Comme à La Havane, pas de vitres, juste des volets à lamelles et la clim. Pas de problèmes de moustiques. Quant à la voiture, nous allons pouvoir la garer quelques rues plus loin, à l’abri chez un particulier. Nous rencontrons un couple de jeunes Français qui occupent l’autre chambre qui donne sur le patio.
A 19h, nous retrouvons sur une place notre auto-stoppeur. Il nous mène chez une dame. C’est bien ce que nous pensions. Ce n’est ni sa femme, ni un paladar répertorié. Lui est un rabatteur qui sera commissionné ; pour elle, c’est un moyen d’améliorer le quotidien. Les restrictions ont amené les Cubains à élever la débrouillardise au rang de l’art !
En tout cas, nous passons une bonne soirée dans un agréable petit patio et mangeons une délicieuse langouste. Il sera même possible de boire du vin blanc que notre hôte va acheter chez un commerçant d’à côté. Nous lui proposons de boire un verre, et nous laisserons la bouteille à notre départ. Une aubaine, car le vin, probablement importé, est cher. Comme nous nous en doutions, le monsieur quitte la maison en même temps que nous…
Nous nous baladons de nuit dans les rues de Trinidad. Les portes ouvertes pour laisser entrer un peu de fraîcheur  révèlent les superbes vestiges surannés des maisons de l’époque coloniale.
De retour à la casa, nous discutons dans le patio avec le couple de Français, dans la douceur de la nuit.

Samedi 26 avril 2008

Après le petit déjeuner que l’on prend dans le patio, nous visitons Trinidad.
Etablie en 1514 par les conquistadors, la ville vécut du commerce du tabac, de la contrebande puis de la culture de la canne à sucre. Premier port d’entrée sur l’île d’esclaves africains, elle devint prospère et se dota de superbes palais. Puis ce fut le déclin pendant près d’un siècle. Ce qui lui permit d’arriver jusqu’ici intacte et d’être inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco.
Pour l’anecdote : en sortant dans la rue, nous croisons un cochon tenu en laisse !


Il est facile de s’orienter à Trinidad. Les rues du centre-ville sont articulées autour de la plaza Major. Le vieux centre historique pavé, interdit aux voitures, se parcourt à pied. On se perd dans les ruelles, on se tord les chevilles sur les pavés inégaux.


Cœur historique et architectural de la ville, la plaza Major dégage une harmonie totale, encadrée de superbes demeures coloniales aux tons pastel, rehaussée de majestueux palmiers, cernée par d’élégantes grilles blanches, aménagée de bancs de fer forgé.
















Vue dégagée sur les rues en pente douce qui la prolongent.
Nous visitons le musée de la Lutte contre les Bandits (en espagnol dans le texte !). C’est l’inévitable musée de la Révolution. Installé dans un ancien couvent, il relate les combats des années 1960 contre les ennemis de la révolution castriste qui opéraient dans les zones montagneuses de l’Escambray.
Visite également du palais Cantero, ou musée municipal d’Histoire. Logé dans une ancienne maison coloniale, il retrace l’histoire de Trinidad depuis sa fondation. Par un étroit escalier de bois très pentu, on grimpe au sommet du mirador. Superbe panorama sur la ville et la sierra de l’Escambray. Belles photos de la plaza Major.




Dans le haut du centre ville, la plaza Santa Anna avec son église en ruine a conservé une réelle authenticité. La façade fantomatique de l’église me fait penser au décor d’un western spaghetti.


Au coin des rues, nous sommes interpellés par des gens qui proposent de venir chez eux manger de la langouste.
Il est temps de faire une pause. Nous allons prendre un cocktail à la Cancháncara, une des plus anciennes maisons de Trinidad. On y sirote une « cancháncara », cocktail maison, bercés par les sons d’une salsa. On va manger au restaurant El Jigüe, situé sur une charmante place devant un arbre planté en commémoration de la première messe célébrée à Trinidad en 1513. Le bâtiment est couvert de mosaïques bleues. On y déguste une spécialité, le « pollo al Jigüe », poulet grillé sur un lit de spaghettis et de fromages.

A 14h, nous rentrons à la casa. La chaleur devient difficile à supporter. Nous faisons une sieste jusqu’à 16h30.
Nous décidons de faire une balade au mirador de la Vigía. Après le beau mur-clocher d’une église en ruine, le chemin caillouteux grimpe sec jusqu’au sommet. Viviane préfère m’attendre en cours de montée. Je poursuis jusqu’au mirador (en fait, une antenne) d’où l’on a un panorama imprenable sur la ville, la sierra de l’Escambray et la vallée de los Ingenios. Le gardien de l’antenne me laisse pénétrer derrière des barbelés pour me faire bénéficier d’un meilleur point de vue. Je rejoins Viviane, et nous retournons en ville. Sur le trajet, des enfants quémandent des stylos, les parents du savon. Quelle tristesse, un peuple autrefois si fier, ainsi réduit à la misère !
Nous passons la soirée chez nos hôtes dans la jolie cour intérieure. 


Je fume un des deux cigares que j’avais achetés à La Havane. Tout à coup, quelques gouttes de pluie orageuses rafraichissent l’atmosphère. Nous sommes fin avril. A partir de mai les précipitations vont petit à petit augmenter jusqu’à la saison des pluies qui débute en juin. Nous mangeons dans le patio avec le couple de Français. Nous avions réservé ce matin le repas auprès de nos hôtes. Non, plus de langouste pour moi !

Dimanche 27 avril 2008

En ce dimanche matin, les rues de Trinidad sont désertes. Nous récupérons la voiture pour aller passer la journée dans le massif de l’Escambray. Ce massif  fut le refuge des guérilleros du Che puis, après 1959, d’un foyer contre-révolutionnaire. La route grimpe dans la montagne, raide et tortueuse. Lors d’un arrêt à un bar-mirador, on peut apprécier le panorama sur la péninsule d’Ancón et la baie de Casilda.
Végétation luxuriante de bambous, caféiers, pins, eucalyptus. Flore d’orchidées, d’hortensias et de mariposa, fleur symbole de Cuba.
Halte à Topes de Collantes, station de cure à 800 mètres d’altitude, dans un parc naturel. Nous visitons un jardin de caféiers où plusieurs variétés se côtoient : parcours pédestre didactique sur l’histoire du café, son apparition et les particularités de sa culture en plein cœur de la chaîne de montagne.


Après cela, passage obligé à la Casa del Café, avec dégustation d’un café créole et bien sûr l’achat de quelques paquets.
Nous faisons également une incursion au jardin La Represa, verdoyant et sauvage, peuplé de diverses essences d’arbres originaires du monde entier. Aujourd’hui dimanche, c’est un lieu convivial où sont rassemblées de nombreuses familles cubaines qui boivent, mangent et font la fête autour de brochettes et de grillades.


Nous traversons le massif  de l’Escambray. Au retour, à Güinía de Miranda, nous sommes surpris par une averse aussi brève que violente. Avec un jeune auto-stoppeur, nous atteignons la vallée des Moulins à sucre (« valle de los Ingenios »).
Après trois siècles de culture du tabac et d’un important commerce de contrebande, la région s’est tournée à partir du XVIIIe siècle vers l’industrie sucrière. Des milliers d’esclaves y ont été exploités par les Européens.
A Manaca, la tour Iznaga domine la vallée du haut de ses 43,5 mètres et ses sept étages. Elle fut construite par le négrier Iznaga, devenu par la suite un riche planteur, pour surveiller les esclaves dans les champs. Nappes et vêtements brodés attirent les visiteurs au pied de la tour. Juste à côté, un restaurant est implanté dans l’ancienne propriété des Iznaga. Nous y mangeons sur le pouce avec notre passager. Dans le jardin derrière, on peut admirer l’un des derniers moulins à canne à sucre du XIXe siècle.


On dépose le jeune à Trinidad puis on retourne dans la vallée, vers l’hacienda Guachinango.
On traverse des champs de canne à sucre à perte de vue. 



Lorsque nous nous garons à proximité, des jeunes viennent nous demander quelques pesos pour surveiller la voiture ! Ça devient pénible… La maison est une superbe hacienda coloniale avec une longue véranda. Il y a possibilité de restauration. Pour l’heure, nous nous contentons d’admirer quelques fresques encore visibles dans l’un des salons.
Sur la route du retour, on croise des camions dont la benne est pleine de passagers.
Le camion est un mode de transport en commun très répandu à Cuba, vu le manque d’autocars. Les places assises sont réservées aux femmes.


On longe de beaux paysages : une savane où pâturent des vaches accompagnées de leurs hérons garde-bœuf, avec des palmiers en deuxième plan et la montagne au fond.
















Les petits vautours urubus à tête rouge survolent la savane et se posent au bord des routes en quête de cadavres.


Nous sommes de retour à Trinidad à 18h et allons prendre un cocktail à la Cancháncara avant de rentrer à la casa.  
« Mucho travail ! » soupire notre hôte qui arrose les plantes et les fleurs du patio. Ce qui a le don d’énerver sa femme : d’après elle, il n’en fout pas une rame de toute la journée ! En effet, chaque fois que nous sortons, nous le voyons très occupé, assis dans la rue…
Nous mangeons à la casa avec nos compagnons français. Par la suite, ils vont sortir en ville. Il y a de la musique et des danses sur la plaza Major. Nous, fatigués de la journée, on reste là…

Lundi 28 avril 2008

Ce matin, nous avons décidé d’aller à la plage ! Une concession faite à Viviane…
Au bout de la péninsule d’Ancón, à une quinzaine de kilomètres de la ville, une ancienne route pleine d’ornières mais carrossable longe la mer des Caraïbes.
Curieusement, personne pour nous faire payer le parking gardé où nous stationnons. Les plages sont désertes. Il faut dire qu’après le week-end, les Cubains sont au travail et les touristes dorment encore. Seuls des vendeurs de corail noir (qu’il faut bien évidemment refuser) surgissent d’on ne sait où. Le corail noir est une espèce en danger que l’on trouve en vente partout sous forme de bijoux, gris-gris ou boucles d’oreille.
La végétation ne foisonne pas, mais la couleur de l’eau est paradisiaque, d’un  bleu très pur. Nous sommes seuls sur une plage de sable blanc avec quelques paillotes en feuilles de palmes décrépies. Idyllique ! Nous allons y rester deux heures. Viviane semble apprécier la mer des Caraïbes et nage à cœur joie. 



Quant à moi, je nage un peu, je furète dans les rochers à la recherche de crabes puis je patiente à l’ombre.
Un gardien va quand même se pointer…
Quand nous rentrons à Trinidad, nous visitons un atelier de céramique. Travail de la terre et de l’argile de l’Escambray depuis cinq générations. En face, beaucoup moins intéressant, c’est le magasin, pour les souvenirs de voyage, là où s’arrêtent les bus de touristes.
Nous mangeons au restaurant El Mesón del Regidor, dans un patio avec un orchestre.

L’après-midi, nous gagnons le parc naturel El Cubano, à 7 km de la ville.  L’entrée du site est payante. Magnifique balade à pied dans la forêt tropicale, qui démarre par un petit pont suspendu en bois. 


Le sentier parcourt la forêt, emprunte des escaliers et des passerelles qui franchissent les fossés.


On passe devant la cabane à toit de chaume du gardien du parc.


Le sentier longe une rivière jusqu’à la cascade de Javira qui forme un puits d’eau bleue dans un cirque rocheux.


Végétation de palmiers, d’agaves, de papyrus, de gommiers rouges, peuplés d’oiseaux. 


Après cette promenade, nous prenons un pot à la buvette de l’entrée du parc sous une grande paillote.
Le soir, nous mangeons à la casa.

Mardi 29 avril 2008

Départ de Trinidad vers 8h30 pour rentrer à La Havane.
Nous reprenons la route de Cienfuegos. On croise régulièrement le long des routes des cow-boys à cheval gardiens de troupeaux. Mais le cheval est aussi un moyen de transport.


Nous rejoignons l’autopista que nous empruntons jusqu’au carrefour de la péninsule de Zapata. Nous nous dirigeons vers La Boca, où nous étions déjà passés vendredi. C’est une sorte de complexe touristique  avec restos, bars, boutiques de souvenirs. C’est aussi le port d’embarquement pour la « laguna del Tesoro », un lac salé entouré de mangrove et de marécages.
Nous visitons le centre de reproduction de crocodiles de CubaDeux espèces de crocodiles vivent à Cuba : le croco-dile américain et le crocodile de Cuba, endémique.
Les crocodiles sont visibles dans différents bassins, en fonction de leur âge. On passe des bébés de 15 cm aux plus gros crocodiles qui peuvent atteindre quatre mètres et qui se prélassent au soleil en restant des heures immobiles. 

















En face, la réserve de crocodiles vise à sauvegarder ces deux espèces dans des étangs au milieu des marécages. D’après le Routard, c’est le même ticket qui sert aux deux sites. Comme on veut nous faire payer une nouvelle entrée, nous n’y allons pas. Dommage !
Nous nous rabattons sur le restaurant La Rionda, sur l’embarcadère, sous un toit de palme. On y mange du steak de crocodile ! On aimerait faire une promenade en barque sur la lagune. Mais ce serait trop long, et cher !

Nous arrivons à La Havane vers 15h. Nous faisons un passage au centre-ville et vers le port. Des pélicans bruns (Pelecanus occidentalis) survolent le chenal et plongent en piqué pour pêcher des poissons…


Une sirène de navire retentit. Un cargo battant pavillon chinois entre dans la baie de La Havane. Son pont supérieur est chargé d’autobus !
Les relations avec la Chine ne cessent de se renforcer. La Chine essaye de prendre la place de l’URSS. Le grand pays frère communiste pourrait servir d’exemple pour une transition économique à la chinoise.
Nous sommes de retour à la « casa particulare » où nous avions été hébergés la semaine dernière. Nous y rencontrons un routard français qui vient d’arriver. Il nous raconte comment il a failli se faire escroquer à l’aéroport. Au lieu de faire la queue à un bureau de change officiel, il s’est laissé entraîner à un autre guichet isolé. En effet, pas de queue. On lui a remis une liasse de pesos contre des euros. Seulement voilà, seuls les premiers et derniers billets étaient des pesos convertibles. L’intérieur de la liasse était composé de pesos cubains ! Heureusement pour lui, il se méfiait et il a éventé la supercherie. « On s’est trompé, excusez-nous… »
Nous mangeons dans un paladar du Vedado, « Nerei », dans une belle maison de style colonial avec sa terrasse à colonnes.

Mercredi 30 avril 2008

Ce matin, nous véhiculons notre compagnon jusqu’à Centro Habana.
Nous visitons alors la fabrique de cigares Partagas. Fondée en 1845, c’est l’une des plus anciennes fabriques de havanes de la capitale. C’est ici que les stars achètent leurs cigares. Visite guidée en français. On assiste à tout le processus de confection d’un vrai havane. Vraiment passionnant.
Le règlement intérieur est surprenant. Un « lecteur » est chargé de lire le journal à voix haute le matin, un roman l’après-midi. Il paraît que le nom des cigares « Roméo et Juliette », « Monte Cristo » viennent de là. Ils auraient été créés pendant la lecture de ces romans. Il est autorisé de fumer sans restriction sur place ! On y apprend qu’un rouleur spécialisé, après huit mois de formation,  gagne quatre fois plus qu’un médecin, c’est-à-dire l’équivalent de 80 euros par mois ! Les consignes de sécurité, aussi, valent leur pesant d’or : conduite à tenir en cas d’attaque terrestre, en cas d’attaque aérienne…

En sortant de la fabrique, on se promène dans Centro Habana, notamment la rue San Rafael. De superbes bâtisses coloniales décaties ou en passe de s’effondrer accueillent les familles les plus populaires. On est plongé dans la réalité de la vie des Habaneros.
Ne pas oublier le bureau de poste. Comme à chacun de nos voyages, nous allons acheter des timbres pour Serge. Le postier nous voit venir ! Attention, dis-je, je paie en « moneda nacional ». Beau joueur, il a un petit sourire. Le sport, c’est de faire payer aux étrangers la valeur faciale des timbres non en pesos cubains mais en CUC et d’empocher la différence !
On a besoin d’un petit remontant. Nous nous réfugions au bar Dos Hermanos, face au port,  pour boire un « mojito » et y manger, accompagnés par l’orchestre. 


A Cuba, la musique demeure un des éléments fondamentaux de la société. Les danses et les chants religieux liés à la « santeria », essentiellement percussionnistes, puisent directement aux racines africaines. Réduits en esclavage, ces hommes et ces femmes mêleront leurs rythmes à la culture espagnole véhiculée par les colons. Ces sonorités sont également nourries par des influences françaises, haïtiennes et italiennes.

L’après-midi, empruntant le tunnel qui passe sous la baie,  nous visitons la forteresse de los Tres Reyes del Morro.
Construite à la fin du XVIe siècle par les Espagnols, elle commandait l’accès au port, donc à la ville. Les Anglais s’en emparèrent en 1762 et se rendirent maîtres du pays.
On paie notre entrée à une guérite aux abords du site. Dans l’enceinte de la forteresse, un gardien tente de nous faire payer une deuxième fois. C’est vraiment une tentative d’escroquerie caractérisée. Evidemment nous refusons et pénétrons dans l’enceinte. Mais ça commence à bien faire. Nous avons le sentiment pénible d’être une pompe à fric. Tout est bon pour soutirer de l’argent, dans la course effrénée aux pesos convertibles. 
Située à l’entrée de la baie, avec son vieux phare et son avancée en éperon sur la mer, la forteresse offre un beau point de vue sur la baie de La Havane et sur le Malecón. Le temps s’est gâté. De gros nuages assombrissent  la baie.
















On déambule dans les cours, les coursives, sur les remparts et les terrasses.

Il est temps maintenant de rentrer à la casa pour chercher nos bagages. Nous en partons vers 17h.
Demain, c’est le 1er mai. La Havane s’apprête à renouer avec la tradition pour célébrer la fête internationale des travailleurs. Les préparatifs vont bon train sur le Paseo qui mène à la place de la Révolution.
Nous allons encore prendre un pot en terrasse sur le front de mer El Malecón. Entre-temps le soleil est revenu. La mer est agitée, les vagues déferlent sur le parapet.
Sur la route de l’aéroport, la 5e avenue, dans le quartier de Miramar, nous sommes attirés par un grand parc où poussent d’impressionnants ficus du Bengale (ou banians). Nous y faisons une halte.
Le banian produit des racines aériennes suspendues aux branches horizontales, qui forment de véritables racines lorsqu'elles touchent le sol. Ces racines, en s’étendant, peuvent créer une forêt à elles seules.


Nous rejoignons l’aéroport pour 19h30 et  rendons la voiture à une agence située sur le parking. Il nous faut payer une journée supplémentaire parce que l’on n’a pas rendu la voiture ce matin comme prévu.
Ensuite ce sont les formalités de départ. On acquitte une taxe d’embarquement de 25 CUC. C’était prévu !
L’avion d’Iberia décolle  à 23h…

Jeudi 1er mai 2008

… Nous arrivons à 14h à Madrid (heure espagnole).
15h30 – 17h30 : vol Madrid – Paris.
Nous rejoignons Ris-Orangis en RER pour nous rendre chez Patrice et Christiane.


*****

1 commentaire:

  1. Maisons craquelées, palais lézardés, façades fatiguées, des demeures ouvertes, tout vert...
    S'en suit une planche théâtrale,
    du haut clocher qui pointe par dessus tout
    contre-plongée en verts et roses doux que pointe un pathétique noir et blanc
    linge flottant au vent, comme
    demi-deuil de fin de période faste...
    Quand les enfants dansent devant le portrait du Che
    l'itinérant, omni présent Révolucionnaire

    De los dos abuelos à l'archipel de Glissant ces gués d'Afrique en Caraïbes...

    Une construction ou quête du sens, magnifique et pathétique où la traite s'écrit dans les deux sens...
    la force de l'image et de sa mises en scène...

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